Parution : en mai 2015 aux éditions Rivages, et en mars 2017 chez Rivages poche.
Le style, le genre : huis clos sur les émotions d’une femme, sur sa place dans ce début du 20e siècle, roman féministe, roman de genre à la fois désuet et contemporain.
L’auteur : Stéphanie est née en mars 1975. Elle a fait des études universitaires de lettres, plus précisément sur le théâtre élisabéthain. Elle a enseigné en Écosse et en Angleterre.
Elle publie son premier roman Moutarde douce (Robert Laffont) à l’âge de 26 ans. Elle obtient plusieurs prix pour les romans suivants : le Prix Lilas 2009 pour Combat de l’amour et de la faim (Fayard), le Prix Thyde Monnier de la Société des Gens de Lettres en 2010 pour La distribution des lumières (Flammarion). Elle a également publié chez Stock, Léo Scheer, Seuil, …
Pour ceux qui lisent Amélie Nothomb vous retrouvez Stéphanie Hochet, une de ses vieilles copines, dans le personnage de Pétronille paru en 2014 dont elle s’est librement inspiré (comme on dit !).
Les lieux : la campagne anglaise et Londres pendant la première guerre mondiale.
L’histoire : en 1917 dans une petite ville, Lewes, dans le comté du Sussex, pas très loin de Londres, une famille anglaise mène une existence bourgeoise. Edward Whig est horloger, il tient une échoppe à Londres qu’il a pu ouvrir grâce à la dot d’Anna son épouse. Celle-ci est une femme lettrée traductrice du français et jeune mère de Jack, 2 ans. Elle est impatiente de se remettre au travail et de profiter enfin de quelques instants de liberté. Le couple se met à la recherche d’une garde d’enfants dans la région sans succès, la guerre a désorganisé les campagnes. Ils se résolvent à publier une petite annonce dans le Times, ils reçoivent un matin un courrier d’une certaine George, qui lorsque Anna va l’accueillir à la gare se révèle être un jeune homme. S’il convient parfaitement à Anna et encore plus à Jack, ce ne sera pas le cas pour Edward.
Mon avis : Ne vous attendez pas à un roman à la Delly (le début de l’histoire pourrait tout à fait s’y prêter) car tous les textes de Stéphanie sont en général sombres voire apocalyptiques. Même si ce roman est très différent des autres, ici pas de fantastique ni de sujet totalement contemporain (quoique…). C’est le quotidien d’une femme qui est décrit, rythmé par les actions à entreprendre pour la bonne marche de la maison, autant dire pas très réjouissant…. Guère de raisons de s’épanouir pour Anna qui se retrouve isolée avec son fils après avoir fui comme beaucoup de londoniens les bombardements allemands sur Londres.
L’arrivée de George va marquer le début de l’effritement du couple sur fond de guerre (son cousin disparaît dans les tranchées sans que l’on retrouve son corps), d’émancipation des femmes et de questionnement sur la maternité qui devient au fil des pages de plus en plus inquiétant.
Stéphanie s’est mise dans la peau d’une Anglaise, elle y réussit si bien que tout naturellement elle a puisé dans l’univers de Virginia Woolf (dont elle connaît parfaitement l’œuvre) notamment pour toutes les descriptions sur la misère sociale pendant le conflit et sur les disparus dans les combats de l’Est de la France.
Ce qui est également très bien rendu c’est ce bouillonnement dans les esprits qu’on sent puissant et pourtant silencieux et qui va finalement au gré des événements du siècle faire exploser la société post victorienne, incarnée ici par Anna, Edward et George.
L’épilogue situé en 1940 est surprenant…
Pour résumer : un huis clos très prenant et très tourmenté.