Parution : aux éditions Calmann-Lévy en 2010 et au Livre de Poche en mars 2011
Le style, le genre : roman à classer dans le genre thriller social. Il est constitué de trois parties : avant, pendant et après. Les première et troisième parties sont écrites à la première personne par le héros du livre Alain Delambre, et la deuxième partie par un autre personnage David Fontana dont je ne dirai pas un mot à ce stade…
Les lieux : Paris, Ile de France, Normandie.
L’auteur : Pierre est né le 19 avril 1956 à Paris. Après des études de psycho il enseigne à des adultes les littératures française et américaine. Puis il commence à écrire des polars. A 55 ans (en 2006) il gagne le Prix du premier roman au festival de Cognac (défunt festival cinématographique et littéraire puisque disparu en 2007) pour Travail soigné suivi d’Alex et de Sacrifices. Un quatrième volet Rosy et John parait directement en format poche en mai 2014. Il obtient le prix Goncourt en 2013 pour l’excellent Au revoir là-haut roman sur l’après guerre 1914-1918.
L’histoire : Alain Delambre est un cadre de cinquante-sept ans complètement usé par quatre années de chômage. Ancien DRH, il accepte des petits jobs qui le démoralisent. Au sentiment d’échec s’ajoute bientôt l’humiliation de se faire botter les fesses pour cinq cents euros par mois… Aussi quand un employeur, divine surprise, accepte enfin d’étudier sa candidature, Alain Delambre est prêt à tout, à emprunter de l’argent, à se disqualifier aux yeux de sa femme et de ses filles, et même à participer à l’ultime épreuve de recrutement : un jeu de rôle sous la forme d’une prise d’otages. Il s’engage corps et âme dans cette lutte pour retrouver sa dignité. S’il se rendait compte que les dés sont pipés, sa fureur serait sans limite. Et le jeu de rôle pourrait alors tourner au jeu de massacre… (texte éditeur)
Mon avis : roman haletant du début à la fin avec des réflexions glaçantes et tout à fait bien vues sur les relations économiques et sociales. Outre la grande qualité de son écriture il en profite pour se livrer à un réquisitoire contre les médias et leurs programmes abêtissants ; TF1 en prend plein la lucarne, tout comme Pôle Emploi d’ailleurs.
« Depuis quatre ans qu’on se connaît, forcément, je considère mon conseiller du Pôle Emploi comme l’un de mes proches. Il m’a dit récemment, avec une sorte d’admiration dans la voix, que j’étais un exemple. Ce qu’il veut dire c’est que j’ai renoncé à l’idée de trouver du travail, mais que je n’ai pas renoncé à en chercher. Il croit voir là le signe d’un fort caractère. Je ne veux pas le démentir, il a trente-sept ans et il faut qu’il conserve ses illusions le plus longtemps possible. Mais en fait je suis plutôt soumis à une sorte de réflexe d’espèce. Chercher du travail, c’est comme travailler, comme je n’ai fait que ça toute ma vie, ça s’est incrusté dans mon système neurovégétatif, quelque chose m’y pousse par nécessité, mais sans projet. Je cherche du travail comme les chiens reniflent les réverbères. »
Quant aux théories du management elles se transforment sous sa plume en machine de guerre.
« Mon expérience du management m’a déjà bien préparé aux techniques de manipulation. L’interrogatoire d’otages, ce n’est jamais qu’un entretien d’embauche, multiplié par un entretien annuel d’évaluation et porté au carré par la présence des armes. La principale différence est qu’en entreprise les cadres vivent dans une peur larvée, alors que dans la prise d’otages, les victimes risquent ouvertement leur vie. Quoique. En entreprise aussi. Finalement, la seule différence, c’est la nature des armes et le délai d’incubation. »
J’ai eu envie dès le début de la lecture de prendre fait et cause pour ce chômeur victime en puissance mais c’est plus compliqué que cela, le personnage en quête d’emploi se révèle aussi menteur et manipulateur que les ennemis contre lesquels il lutte. Ses relations avec sa famille sont peu claires c’est d’ailleurs une des critiques que je fais à ce roman, j’ai trouvé le canevas des relations avec sa femme et ses filles assez artificiel alors que l’intrigue en elle-même est génialement réussie.
Ce qui est certain c’est que je me suis faite surprendre plusieurs fois au cours de la lecture par des rebondissements inattendus, vous me direz que c’est le principe du thriller mais quand un thriller est écrit par un bon écrivain on voit la différence… Son texte est truffé de références littéraires et philosophiques ce qui ne gâte rien.
Pour résumer : le genre de roman impossible à lâcher. Avec en prime un personnage très attachant Charles, SDF, qu’on aurait absolument envie d’aider.
Excellent roman, très bien écrit…auteur à suivre : tous ses polars sont addictifs…
sylvie
ça marche ! le commentaire est bien arrivé :-))
et je suis 100 % d’accord