Parution : en 2013 chez Christian Bourgois / mars 2014 dans la collection de poche 10/18
traduit de l’anglais par Eric Chedaille
Les lieux : Londres – Edimbourg – Boulogne sur mer
Le genre : récit historique (XIXe siècle)
L’auteur : Kate est anglaise, elle est née en 1965. Elle est diplômée d’Oxford et de Stanford en histoire et en journalisme . Elle est l’auteur en 1998 de : « The Queen of Whale Quay » (pas encore traduit en français) pour lequel elle a reçu le prix Somerset Maugham, et de « l’Affaire de Road Hill House » en 2008 qui raconte l’une des affaires criminelles les plus tonitruantes de l’histoire anglaise. Le suivant « Mrs Robinson’s Disgrace » (La déchéance de Mrs Robinson) était très attendu, il a été publié en 2013 par les excellentes éditions Christian Bourgois.
Le sujet : En août 1837, dans le comté anglais des West Midlands, Isabella est la première des sœurs Walker à se marier, elle a 24 ans. Mariée sur un coup de tête et probablement sans amour, elle se retrouve veuve quatre ans plus tard avec un enfant à charge. En 1844 elle est présentée à l’ingénieur protestant Henry Robinson. Elle l’épouse, parce qu’il ne lui reste plus beaucoup de temps avant d’être immariable, et s’installe avec lui à Londres puis à Edimbourg. En 1850 à l’occasion d’une soirée chez Lady Drysdale, elle y rencontre son gendre, Edward Lane, de dix ans son cadet. Isabella s’éprend de lui et rend compte de cette passion dans son journal intime même s’il est difficile de connaître la réelle teneur de leur relation. Alors qu’Isabella est souffrante Henry découvre son journal en 1855 et
décide d’engager une procédure de divorce.
Mon avis : Ecrit à partir d’archives judiciaires et d’articles de presse (100 pages de notes bibliographiques sur les 400 pages que compte le livre), c’est une réussite totale. C’est un récit construit comme un roman, Kate traite le sujet comme une véritable histoire policière. J’ai suivi l’histoire d’Isabella, malheureuse en amour, dans la société victorienne où aucun comportement féminin sensuel et libre n’est accepté, surtout quand il y a soupçon d’adultère.
Cette affaire a passionné les Britanniques en 1858. La cour des Divorces, tribunal laïc, est créée quelques mois plus tôt, le procès est houleux. Les reconstitutions des scènes de procès sont captivantes. Les débats font rage : quelle est la raison d’être d’un journal intime : y consigner des faits ou des fantasmes ? A-t-on le droit de violer l’intimité d’une personne en dévoilant son journal ?
Extrait : « L’idée que certains types d’écrits étaient dangereux – particulièrement pour les jeunes femmes – était très répandue. Les coupables étaient le plus souvent des romans français ; mais le journal d’Isabella Robinson démontrait qu’une Anglaise de la classe moyenne était capable d’attenter à la décence avec sa plume. Le tribunal des Divorces examinait l’adultère du point de vue de la partie lésée, offrant ainsi au public massé dans la salle et aux lecteurs de la presse le regard du cocu sur les liaisons illicites de sa femme. Le journal d’Isabella compliquait cependant cette perspective : apprendre les circonstances de sa découverte par Henry était certes propre à placer la Cour dans la position du mari horrifié ; toutefois, en entendre des extraits revenait à adopter le point de vue de l’épouse, à se représenter l’adultère comme le considère une femme infidèle. »
Pour résumer : Le fil rouge qui court tout au long du livre c’est Madame Bovary, puisque Flaubert vient de le faire paraître l’année précédente : plutôt le divorce que le suicide… On ne peut qu’être d’accord !