Parution : en août 2019 aux éditions Grasset, puis en août 2020 en poche chez LGF.
Le style, le genre : roman uchronique mêlant plusieurs genres, de l’aventure, du picaresque et de l’humour.
L’auteur : Laurent Binet est l’auteur de HHhH (Grasset, 2010 – prix Goncourt du premier roman), Rien ne se passe comme prévu (Grasset 2012) et de La septième fonction du langage (Grasset, 2015, prix du roman Fnac, prix Interallié) où il imagine l’assassinat de Roland Barthes. Il a été professeur de lettres pendant dix ans en Seine-Saint-Denis. Laurent Binet s’est appuyé pour écrire ce roman sur l’idée de l’historien français Patrick Boucheron qu’« au XVe siècle d’autres mondialisations étaient possibles ».
Les lieux : en Europe du nord, dans le sud du continent qui aurait pu ne pas s’appeler Amérique, l’Europe.
L’histoire : vers l’an 1000 la fille d’Erik le Rouge met le cap au sud avec son mari, quelques hommes, du bétail et des chevaux / 1492 : Colomb ne découvre pas l’Amérique / 1531 : les Incas envahissent l’Europe. À quelles conditions ce qui a été aurait-il pu ne pas être ? Il a manqué trois choses aux Indiens pour résister aux conquistadors. Donnez-leur le cheval, le fer, les anticorps, et toute l’histoire du monde est à refaire.
Civilizations est le roman de cette hypothèse : Atahualpa débarque dans l’Europe de Charles Quint. Pour y trouver quoi ? L’Inquisition espagnole, la Réforme de Luther, le capitalisme naissant, le prodige de l’imprimerie, et ses « feuilles qui parlent ». Des monarchies exténuées par leurs guerres sans fin, sous la menace constante des Turcs. Une mer infestée de pirates. Un continent déchiré par les querelles religieuses et dynastiques. Mais surtout, des populations brimées, affamées, au bord du soulèvement, juifs de Tolède, maures de Grenade, paysans allemands : des alliés.
De Cuzco à Aix-la-Chapelle, et jusqu’à la bataille de Lépante, voici le récit de la mondialisation renversée, telle qu’au fond, il s’en fallut d’un rien pour qu’elle l’emporte, et devienne réalité.
Mon avis : les critiques avaient parlé en 2015 de son roman La septième fonction du langage comme d’une gourmandise intellectuelle, c’est encore le cas ici avec les Incas en majesté, il s’en fait même une spécialité.
L’Histoire renversée c’est une idée toujours géniale, suivre la fille d’Erik le Rouge « un peu » plus loin offre un amuse-bouche savoureux, Cristobal Colon passe un sale quart d’heure, puis l’enchaînement des épisodes suivants ne déçoit pas même si une bonne connaissance de l’histoire du monde et particulièrement de celle de l’époque de la Renaissance aide à suivre le récit. Elle pourrait paraître comme une suite ininterrompue de faits qui peut être un peu lassante avec un effet « catalogue » surtout quand on suit Atahualpa hors du royaume d’Espagne aux prises avec les subtilités de la Réforme, Luther, Muntzer, et autre Melanchton. Comme un sentiment d’excès d’érudition parfois… C’est toutefois un bon moment de lecture même si j’aurais préféré que la temporalité du récit reste circonscrite à l’Espagne. Très belle écriture.
Pour résumer : un bon livre à prendre comme une fantaisie, ainsi que le dit l’historienne Michelle Perrot.
je signe ton bandeau rouge …… – toutefois j’ai moi enlevé le « beaucoup » …. j’étais un peu sonné après la lecture, avec le tournis…. mais c’est vraiment réjouissant.
J’avoue que j’ai un peu hésité aussi avec cette catégorie mais le côté brillant de l’exercice l’a emporté même si je sais que certains lecteurs ne l’ont pas terminé pour les raisons que je donne. Bonnes lectures et bonnes fêtes
Très belle fin d’année à toi, Anniemots. 😀
merci Marcorèle, je te retourne la pareille
🙂