
Parution : en 2012 dans les éditions Zulma, en poche chez le même éditeur en 2017. Traduction de l’islandais par Catherine Eyjólfsson.

Le style, le genre : road movie singulier ou pour mieux décrire ce livre je devrais écrire comme les éditeurs « équipée hivernale ».
L’auteur : Auður est née en 1958 à Reykjavik en Islande. Après des études d’histoire de l’art à la Sorbonne. elle devient professeur d’histoire de l’art à l’université d’Islande et directrice du Musée de l’université d’Islande. Pourtant écrit avant Rosa Candida, livre qui l’a fait découvrir en France en 2010, L’Embellie ne parait qu’en 2012 aux éditions Zulma, suivi de L’exception, du Rouge vif de la rhubarbe et quelques autres. Pour moi c’est la révélation littéraire européenne du début du 21e siècle.
Les lieux : L’Islande dans tous les sens.
L’histoire : en un laps de temps très court une jeune femme, la narratrice, vient de voir son mari la quitter sans préavis et se retrouve en charge d’un enfant prénommé Tumi, que lui a confié sa mère, sa meilleure amie. Celle-ci peu de temps avant l’accouchement de ses jumeaux s’était rompue une cheville en glissant sur une plaque de verglas. Partie pour un petit weekend de garde, c’est finalement pour plusieurs mois qu’Auður lui demande de s’occuper de son fils. C’est grâce à l’action conjuguée d’un billet de loterie et d’un chalet d’été à déplacer que les deux compères vont partir à l’aventure.
Mon avis : ce roman fonctionne magnifiquement grâce à ce couple improbable. Elle, polyglotte exerçant le métier de correctrice et de traductrice, souffrant d’une blessure originelle dévoilée par petites touches tout au long du récit, ayant un faible pour les aventures amoureuses éphémères, et ne se sentant absolument pas douée pour la maternité et plus largement pour s’occuper d’un enfant. Lui, petit bout de 4 ans, étrange petit bonhomme presque sourd et affublé de grosses loupes en guise de lunettes mais qui développe des compétences tout à fait hors normes grâce à la magie de la fiction.
« (…) – en plus je m’apprête à partir en voyage – en congé prolongé – et je serai absente six semaines au moins, peut-être jusqu’à Noël. Je dois trouver un emplacement pour un chalet d’été dans l’est. (…)
– Tu n’as qu’à le prendre avec toi ; c’est l’enfant le moins embêtant qui soit, il n’a besoin de rien pour s’amuser. Il reste assis tranquillement sur le siège arrière, c’est tout juste si l’on sait qu’il est là, il ne te tanne pas pour obtenir quelque chose, il ne quémande pas, il ne chante même pas comme les autres enfants, il suffit de lui donner à boire de temps en temps, de lui refiler une banane tous les cent kilomètres et d’enfoncer la paille dans sa briquette de Chocolait.
– Je ne connais pas la langue des signes.
– Il entend un tout petit peu, il lit sur les lèvres et se sert d’images gestuelles et de mots pour parler à ceux qui ignorent le langage des sourds-muets. C’est un génie des langues, comme toi : il en parle trois et n’a que quatre ans. Tu n’auras qu’à apprendre la sienne, pour en ajouter une à ta collection. Sérieusement, tu pourrais comprendre un dromadaire. »
Nous avons le bonheur, pendant toute leur équipée, de nous réjouir de cette relation cocasse qui évolue vers une attention et une compréhension mutuelle puis c’est l’émotion.
Pour résumer : c’est encore une fois un plaisir de lecture total. Sensible mais pas mièvre, drôle mais pas racoleur, j’en redemande ! A la fin du livre vous trouverez 47 recettes de cuisine islandaise qui accompagnent le roman, sympa !